
Le don des langues
Ficelle, l’éclair se tortille sous la porte
Finesse, l’œil de poupée du navire
La nasse, trace de verdure dans l’étincelle
La marque, au front du muet qui danse
Au soir, toutes les espérances
— étoiles, ne rien refuser
*
Jouer à casser les réveils
prendre son singe au mot
tordre le cou aux racines
abuser de la patience des fleurs
écarter le doute de l’aube
assurer la permanence du jour
le bris des perfections
le souffle des pisteurs
le tranchant des promesses
toutes les parures du matin
*
Tom Ripley à la plage
Cette lumière, comme un goudron sucré
cette odeur de bananes, de réjouissances forcées
je me la suis appliquée sur tout le corps
on a cru à mon sourire bronzé
aux dentelles de mon regard
j’ai porté aux doigts mes dents en or
aux pieds mes victoires d’argent
on a cru que j’étais enfin papillon
le monarque attendu au bout de la migration
je me suis posé sur la tête du plus grand homme
quand j’ai sifflé
sa femme s’est retournée
mais c’est par milliers que nous les avons recouverts
lui, sa femme, son peuple et son pays
Nous avons alors retourné l’orange et retrouvé l’orage
l’éclat de lune a tout lavé
odeurs, sucres et vanités
le sang de l’invisible est enfin monté
le sang
