Poésie – Jean-Sébastien Larouche



Roger Ballen, Retreat, (2005) Silver gelatin print, 20"×20"




FRANKIE FIVE ANGELS




j’me souviens
d’la voix d’amitié
d’la voix en cendre
tremblotante et l’sanglot
presque aphone
dans l’combiné du téléphone
j’me souviens
du son d’la morve erniflée
par Franky Five Angels
en tout début d’matinée
les mots murmurés, atterrés :
j’me su’s coupé

j’y ai dit : ben
mets un band-aid ostie, man
j’viens à peine de me lever

non, non, me su’s coupé

j’savais c’que ça voulait dire
j’savais qu’y savait pas quoi faire
j’savais que j’savais pas quoi faire

t’est ben cave
mets quèque chose là-d’ssus
j’arrive

crisse

ostie d’polytoxico d’soûlon d’musicien d’artiste du câlisse de tabarnak
cherche d’la gaze cherche d’la gaze passée date
damné fuckeur qui s’prend pour une superstar à marde
descends ‘es marches descends ‘es marches
qui trippe s’‘es osties d’rockeurs morts à tonne
Janis Elvis Cobain Hendrix Morrison
cours dans rue cours dans rue
call un taxi quand y’en a pas
traverse des feux rouges enjambe des p’tits vieux
fais attention aux craques de trottoirs
bouscule les heureux crache à terre

rentre dans l’métro

fffffuuuiiiiiiiit

débarque Mont-Royal

cours dans rue cours dans rue
ostie qu’t’es beau ostie qu’t’es belle
tout’ croche tasse le bling-bling
zigzags entre les chars comme une gazelle
dans un monde de lions
avec des cervelles de télévision
des grosse patoches qui t’éffoirent
ton p’tit cœur tes ions
cours dans rue cours dans rue
building portique ascenseurs miroirs

t’es rendu

ouvre la porte

y’est là
crissé là
les cheveux étampés dans face
assis à terre avec un forty d’bière forte
des vieux bas d’laine sales
croutés sur ses poignets d’ex-suicidé
des rivages pleins d’gales en-d’ssous
des larmes et du sang vaporisés partout
l’amour, tapi dans un coin, qui zyeute
d’une œillade torve rictus de chien
les conséquences de ses coups
la pusillanimité de chirurgien amateur
le kamikaze dans l’supermarché du cœur
pensait s’couper s’trancher d’même pis
s’endormir cru
pis pus s’réveiller pus

j’peux pas te r’coudre, man
faut qu’on aille à l’hôpital

pis pus s’réveiller pus

pis pus s’réveiller pus




Des Éditions de L’Écrou ICI



Laisser un commentaire

Entrer les renseignements ci-dessous ou cliquer sur une icône pour ouvrir une session :

Logo WordPress.com

Vous commentez à l’aide de votre compte WordPress.com. Déconnexion /  Changer )

Photo Facebook

Vous commentez à l’aide de votre compte Facebook. Déconnexion /  Changer )

Connexion à %s