Le repas de poulet
La radio du restaurant est branchée sur la station Rouge FM. La station diffuse le «Décompte Rouge FM» qui est une sorte de top 50. Le garçon écoute la musique jouée par la radio du restaurant. Le regard oublié sur la nuit devenue vide. De molles rêveries pauvres en images. Les rêveries se nourrissent de musique et le garçon de poulet. Le garçon comprend que les chansons du « Décompte Rouge FM » parlent d’une fille et un garçon qui se séduisent par la danse avant de faire l’amour. Le garçon n’a jamais fait l’amour. Les chansons du « Décompte Rouge FM » sont ce qu’il connaît de plus intime concernant les rapports entre les filles et les garçons. Le garçon n’écoute de musique que quand elle lui est imposée. Comme au restaurant P.F.K.. La musique le met mal à l’aise. La musique bouscule sa pudeur. La musique du « Décompte Rouge F.M. » dit le désir. Le rythme de la musique jouée dans le restaurant dit le corps et son désir. Le garçon n’accepte ni l’un ni l’autre. Il les observe pourtant à l’abri de ses rêveries molles. Il observe les autres se séduire par la danse avant de faire l’amour. Le colonel Harland Sanders le regarde. Le colonel Harland Sanders est vêtu de blanc. Le blanc est la couleur de la merveille au moyen-âge, et celle des bêtes dont la chasse mène en un autre monde et ouvre une aventure. Le garçon mange son repas de poulet et rêve qu’il est en boîte de nuit. Il imagine la fille et le garçon de la chanson qui se séduisent par la danse. Il s’approprie une partie de la vie et du corps du garçon de la chanson. Il se sent un petit peu plus proche du mystère. Il se sent un petit peu plus proche du désir de la fille. Le garçon mord dans un morceau de poulet à la sauce du colonel et s’incarne davantage. La graisse, le sucre et le sel coulent dans sa gorge. Le garçon imagine qu’il est avec la fille de la chanson dans le restaurant P.F.K.. La fille lui sourit, le colonel sourit, le garçon sourit. Le garçon mord dans la cuisse de la fille. La graisse et le sel coulent dans sa gorge. La fille lui sourit et de la commissure de ses lèvres coule du pepsi. Le garçon boit le pepsi. Le garçon lui tend une frite et lui sourit. Le colonel est là qui regarde le couple. Le garçon mord la frite après la fille. Il y a encore sa salive. Il goûte la salive de la fille. La salive de la fille coule dans sa gorge avec la graisse et le sel. Il redonne une frite à la fille. La fille se lève et retrousse ses jupes. Le garçon voit une biche blanche dans le restaurant. Sous sa queue il voit la vulve blanche de son vagin blanc. Comme au zoo. La biche s’allonge et se mange. La biche s’allonge et se mange, car elle est faite de poulet. La biche s’allonge et se mange la cuisse et tremble comme si elle avait mal. La biche arrache avec sa bouche des lanières de peau de poulet de sa cuisse et le garçon regarde la vulve blanche de son vagin blanc. La biche tremble comme si elle avait mal. Le colonel est là qui sourit. Il pointe la vulve blanche avec sa canne. Le garçon regarde la vulve. Le garçon regarde les veinules sanguinolentes de la biche de poulet. Le garçon regarde le liquide brun qui s’épanche. Le fil brun qui coule. Les caillots bruns. Le colonel perce la viande morte avec sa canne. Le fil brun qui coule. Le sucre, la graisse et le sel. Le garçon pourrait prendre du dessert.
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POÈME SALE 