Carpe diem
— Penses-tu qu’il fait assez froid pour une tuque?
— La météo indique quatre degrés avec un facteur éolien de moins deux. Une tuque s’impose, à mon avis.
— Bon.
Il finit de s’habiller. Ils sortent.
— On va au parc?
— N’oubliez pas que vous avez un rendez-vous à neuf heures. Il ne faudra pas trop traîner.
Ils prennent vers l’ouest, en direction du parc. Le chien trotte devant sans tirer sur sa laisse.
— On a largement le temps. J’avoue en avoir marre de ces rendez-vous médicaux. Ça ne donne plus rien de toute façon.
— Ne soyez pas défaitiste. Personne ne sait de quoi l’avenir sera fait.
— On s’en doute quand même un peu. Surtout depuis que mon médecin m’a expliqué que la chimio était inutile et que le pronostic n’est plus que de quelques mois.
— Ne vous en faites pas. Profitons de cette journée. Il y aura peut-être quelques flocons cet après-midi. Ce sera féérique.
— Tu as raison, comme toujours, mon cher Daniel.
— Carpe diem, comme disait Horace.
— Oui, carpe diem. Rappelle-moi de te donner double ration de croquettes au retour.
— C’est gentil, mais ce ne sera pas nécessaire. Mes batteries sont presque entièrement chargées. Je tiendrai largement jusqu’à ce soir.
— Nous y voici.
Il détache la laisse du chien.
— Allez, dégourdis-toi un peu les pattes.
— Merci!
Le chien détale. Ses pattes arrières sont raides, il rebondit davantage qu’il ne court. Pauvre Daniel. Il faudra penser l’emmener au réparateur pour une mise au point.
Un beau petit moment de vie, serein malgré deux personnages mal en point et delicieusement croqué.